
L’espace créé depuis quelques années a été interdit d’exploitation depuis le début de l’année 2025. Une situation qui a poussé la Synaparcam à saisir l’organisation humanitaire Business & Human Rights Resource Centre.
Depuis la cessation des activités du champ-école situé dans le village Mbonjo 1, à 12km de Souza dans l’arrondissement de Bonaléa (département du Moungo, région du Littoral), en février 2025, les communautés villageoises sont vent debout contre ce qu’elles qualifient d’injustice. Le responsable de la Synergie nationale des paysans et riverains du Cameroun (Synaparcam), Emmanuel Elong, estime que la Société camerounaise de palmeraies (Socapalm), filiale de Socfin au Cameroun, y est pour beaucoup. L’organisation qui renforce le plaidoyer des communautés riveraines des agro-industries, a lancé le concept de champ-école depuis 2020, pour accompagner les paysans à pratiquer l’agriculture familiale basée sur l’agro-écologie. « Après avoir accompagné les paysans à les décourager à utiliser les semences améliorées et les produits phytosanitaires dans les exploitations, on a trouvé mieux de faire un champ-école, après une formation sur les biofertilisants (bocachi, compost). Maintenant, il fallait un centre d’apprentissage », explique M. Elong.
Depuis 2023 que le projet de champ-école est opérationnel, la Socapalm a décidé de s’y opposer, ce en début janvier 2025, à en croire les termes de l’activiste Emmanuel Elong, dans un ton remonté. « L’agro-industrie a saisi l’autorité administrative qui a procédé à l’arrêt des travaux et a saisi le commandant de brigade de gendarmerie pour qu’il convoque le président de la Synaparcam et l’entende sur procès-verbal. Nous avons dénoncé ces menaces auprès d’une organisation humanitaire dénommée Business & Human Rights Resource Centre début mai. Elle a saisi Socfin à l’effet de savoir pourquoi un tel projet jugé communautaire a été arrêté », relate notre source.

Socfin-Bolloré empêche les communautés d’utiliser les bas-fonds
Le champ-école en question est une superficie d’environ un hectare, c’est-à-dire des bandes de terre qui ont été impropres à la culture du palmier à huile dans les années 70 quand Socapalm arrivait au Cameroun. « C’est là où on fait nos champs. Le repreneur est décidé à nous empêcher à cultiver de quoi manger. Or, l’article 6.h du bail emphytéotique demande de ne pas replanter dans une superficie de 200 ha de terre sans au préalable laisser un espace vital. Socfin n’applique pas cette disposition. Au contraire, elle continue à prendre toutes les terres qui étaient impropres à la culture du palmier à huile », précise le coordonnateur national de la Synaparcam. « Aujourd’hui, pour Socfin, les techniques culturales ont changé. Elle peut exploiter les pentes. Socfin refuse qu’on dénonce qu’elle est en train de faire des accaparements de terre. Pourtant, c’est ce qu’elle fait sous le contrôle de l’autorité administrative et des chefs traditionnels qui ont probablement quelque chose à gagner en laissant Socfin procéder à ces manœuvres », ajoute notre interlocuteur.
Les sources proches du dossier indiquent que l’entreprise agro-industrielle a commencé avec les sommations d’huissier en janvier. « Nous nous sommes rapprochés de Socapalm qui dispose pourtant d’un mécanisme de gestion des plaintes. Nous croyions que Socapalm allait nous écouter et trouver une solution. Elle est allée plutôt trouver le préfet du département du Moungo qui a ordonné au sous-préfet de procéder à l’arrêt des travaux et de faire convoquer le leader de Synaparcam », soutient M. Elong. Avant de poursuivre : « On n’a plus assez de terres et on travaille dans les bas-fonds qui ont été impropres à la culture du palmier à huile quand l’Etat avait lancé sa société de développement, qui a été privatisée en 2000. Il se trouve que le repreneur qui est le groupe Socfin-Bolloré nous empêche d’utiliser ces bas-fonds où ils veulent faire des extensions ».

A en croire la Synaparcam, Socfin a essayé des réponses qui, à son avis, ne sont pas avérées. Business & Human Rights Resource Centre a fait une réplique des communautés, à laquelle Socfin n’a pas répondu depuis bientôt trois mois. « Alors que quand Socfin nous a interpellé par rapport au dossier de Mbonjo, elle n’a pas pris deux semaines pour justifier la raison pour laquelle elle a bloqué l’école. Aujourd’hui, la Synaparcam s’est déployée pour répondre aux huit questions que Socfin a soulevées, ce dernier est incapable de poursuivre la procédure », déplore l’activiste Elong.